le poid du nom qui pèse sur les frêles épaules du garçon depuis toujours. enfant bien né aux yeux de tous, la cuillère en argent dans la bouche, l’éducation pointilleuse, les rêves de reprise du père… quand le gamin ne rêvait que de liberté, d’aventures, de danger, dévorant les histoires de pirates et autre récit de périples pour tenter en vain d’étancher sa soif de vie, la vraie. roseau qui se plie aux exigences familiales durant toute son enfance, soit ami avec lui, tient toi droit, range tes coudes, tient la porte, ne baisse pas les yeux, arrête de chouiner. gamin qui regardait avec envie les gosses jouer au parc, ignorant des enjeux prenant place de l’autre côté du mur. l’innocence arraché à même la peau, alors que sa mère lui cherchait déjà la parfaite épouse quand il aurait aimé n’avoir à se préoccuper que du dernier jeu vidéo sorti. adolescent qui se rebelle, décide d’envoyer valser les conventions, d’exploser le carcan qui l’empêche de respirer, carcan qui l’étouffe depuis toujours. alors il joue, l’enfant, traîne le soir dans les mauvais quartiers, avec ses airs de princes, à la recherche de ce qui le fera se sentir vivant, libre. première gueule cassée. l’agneau qui se jette au milieu des loups, qui attend qu’on le morde, qu’on le déchiquette, jusqu’à ce que mort s’en suive, s’il le faut. et ça marche. une fois. deux fois. trois fois. jusqu’à ce que la meute ne finisse par se lasser de ce petit jeu trop facile, de ce gosse de riche qui ne fait que se servir d’eux pour obtenir son shoot d’adrénaline. agneau qui finit par se fondre dans le décor, on le tolère, on finit par accepter que quoi qu’on y fasse, il ne bougera pas, finira toujours par revenir. monde de la nuit qui s’ouvre à lui, lui apporte enfin cette sensation qu’il recherchait tant, vide qui semble se combler, l’espace d’un instant. le père se doute, ne sait pas vraiment, mais reste persuadé que ce ne sera qu’une phase, une dernière cavalcade avant d’enfin se ranger dans les clous. grossière erreur d’un homme qui a depuis longtemps fait taire son myocarde, qui a oublié que la fougue de la jeunesse se vit dans la passion, l’intense, l’excès, et qu’une simple paire de jambes suffit à faire perdre la raison au plus sage des adolescents. gamin qui se perd dans les boucles sombres, se noie dans les grands yeux noirs, se brûle contre la peau légèrement trop foncée pour être acceptée dans la famille. il le sait, mais ça lui est égale. coeur qui fait taire le cerveau alors qu’il se berce d’illusions, se convaint que tout est possible, que s’il le faut il s’enfuira avec elle, à l’autre bout du monde, qu’il n’a besoin de rien d’autre, de personne d’autre pour vivre. pauvre fou qui cumule les prises de risques, galvanisé par les caresses, les regards amoureux. poitrine qui se gonfle alors qu’il ose défier le père. elle ou moi. soit elle reste, soit je pars. regard mauvais, ricanement de celui qui se persuade encore que son fils ne sera pas capable de tourner le dos à l’empire qui lui ouvre les bras. certainement pas pour une moins que rien. jusqu’à ce que son fils fasse ses valises. vite, le récupérer, à tout prix, peu importe que ce ne soit qu’un petit con écervelé, il finira bien par rentrer dans le moule. comme tout le monde. fin stratège qui met en place ses pions, une menace par ci, un pot de vin par là… et la voilà qui fini par céder. coeur blessé, torturé, aveuglé par le chagrin de voir que finalement, tout était perdu d’avance. ne reste plus qu’une solution : couper les ponts.